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26 juin 2005

415 : "habiter" vraiment l'espace

[...] Tout commence, au XVIIIe siècle, quand se dessine en France un véritable réseau routier. Auparavant, il existait bien des chemins, mais, un peu à la manière des pistes dans certains pays d'Afrique de nos jours encore. Seuls les ponts ou les gués et les principales étapes étaient fixes ; le tracé des itinéraires changeait en fonction des saisons et de la météorologie.

Le voyage n'était que la translation d'une ville à une autre, le parcours d'un point de départ à un point d'arrivée. Il ne suscitait chez le voyageur aucune vraie curiosité pour ce qu'il voyait le long de sa route. La campagne n'avait pas d'autre intérêt aux yeux des humains que de fournir leur subsistance. La montagne et le littoral marin étaient considérés comme des «déserts», des pays hostiles car stériles.

En procédant à une grande entreprise de cartographie du territoire, puis en constellant la France de voies rectilignes bordées de plantations régulières, venant «scénographier» notre cadre extérieur, les ingénieurs des Lumières, et en particulier ceux du nouveau corps des Ponts et Chaussées, vont bouleverser la perception de notre environnement. L'amélioration des carrosses et des chaises de poste y participera aussi. Les pays traversés deviennent alors de véritables paysages. On commence à goûter leur beauté.

De simple déplacement, le voyage prend l'allure d'une «leçon de choses», d'un apprentissage du monde. La route des Lumières est même, selon Marc Desportes, une «expérience heureuse», en ce qu'elle offre des points d'appui et des références partagés par tous. Sa perception s'harmonise avec la façon dont elle a été conçue. Elle fait naître, autrement dit, une intelligence entière de l'environnement, qui permet que l'on «habite» vraiment l'espace : que celui-ci prenne un sens immédiat et clair....

Tout commence, au XVIIIe siècle, quand se dessine en France un véritable réseau routier. Auparavant, il existait bien des chemins, mais, un peu à la manière des pistes dans certains pays d'Afrique de nos jours encore. Seuls les ponts ou les gués et les principales étapes étaient fixes ; le tracé des itinéraires changeait en fonction des saisons et de la météorologie.

Le voyage n'était que la translation d'une ville à une autre, le parcours d'un point de départ à un point d'arrivée. Il ne suscitait chez le voyageur aucune vraie curiosité pour ce qu'il voyait le long de sa route. La campagne n'avait pas d'autre intérêt aux yeux des humains que de fournir leur subsistance. La montagne et le littoral marin étaient considérés comme des «déserts», des pays hostiles car stériles.

En procédant à une grande entreprise de cartographie du territoire, puis en constellant la France de voies rectilignes bordées de plantations régulières, venant «scénographier» notre cadre extérieur, les ingénieurs des Lumières, et en particulier ceux du nouveau corps des Ponts et Chaussées, vont bouleverser la perception de notre environnement. L'amélioration des carrosses et des chaises de poste y participera aussi. Les pays traversés deviennent alors de véritables paysages. On commence à goûter leur beauté.

De simple déplacement, le voyage prend l'allure d'une «leçon de choses», d'un apprentissage du monde. La route des Lumières est même, selon Marc Desportes, une «expérience heureuse», en ce qu'elle offre des points d'appui et des références partagés par tous. Sa perception s'harmonise avec la façon dont elle a été conçue. Elle fait naître, autrement dit, une intelligence entière de l'environnement, qui permet que l'on «habite» vraiment l'espace : que celui-ci prenne un sens immédiat et clair....

Paysages en mouvement, transports et perception de l'espace XVIIIe-XXe siècle, de Marc Desportes, Gallimard, 420 p., 45 €. 

Patrice Bollon : Le paysage change de point de vue. Le Figaro Littéraire 23 juin 2005. http://www.lefigaro.fr/litteraire/20050623.LIT0050.html?031550


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