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DEFENSE DE SALIVER DES YEUX !
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8 janvier 2006

579 : Je ne pourrais jamais être soldat

"Je ne pourrais jamais être soldat. Pas à cause des fatigues. Pas à cause d'ordres ou de remarques imbéciles d'un caporal quelconque. Pas à cause du froid qui vous recroqueville les doigts et vous brûle les oreilles au matin. A cause de cette absence complète de vie personnelle, à cause de cette vie d'automate sans pensée. Tu me comprendras j'espère en te supposant enfermé dans ton quartier avec tes paysans de camarades, bâfrant la gamelle commune et ne parlant à personne. Ne te semblerait-il pas que tu rêves un sale rêve ? ...

Enfin, voilà pour t'expliquer mon état d'esprit en la bonne ville de Brest. Maintenant parlons de choses de ce monde : je suis malade ... je suis dans un sanatorium à trois km en mer. J'y suis bien et renaît à la vie active - ainsi que peut t'en témoigner cette lettre incohérente - ... Mon île déserte est une vrai île de roman de Conan Doyle. Toute petite, à peine 1 km. de tour, sans communication avec la terre, sauf par un rare bateau à vapeur, parfois empêché par le mauvais temps. Un vieux sanatorium, ancien asile de pestiférés, puis de lépreux, puis de tuberculeux. Des rochers à pic. Et puis comme malades dans cet étrange hôpital une bande (de) coloniaux et de marins abrutis par de trop formidables "bordées" et dont le plus innocent sort de Biribi. Enfin à la tête de tout cela un vieux médecin à cinq galons, invisible et taciturne ...".

Jacques Vaché, Lettre à sa tante adressée de l'hôpital de Brest, sans date.

* *

"... un sac de grenade qui éclate à côté de moi, les miennes qui s'en mettent, voilà toute l'affaire. Mais ce que je ne pourrai jamais dire, c'est la chance que j'ai eu : Quand je pense que plus de trente grenades explosives ont éclatés à mes pieds (alors qu'une seule avait blessé 19 boches sous mes yeux) - et que je portais de quoi asphyxier un régiment, sans compter une espèce de cylindre incendiaire "Excelsior" dit le prospectus - d'un modèle nouveau - je me demande comment j'ai pu en réchapper."

:"Je regrette fort d'avoir été blessé le matin d'une journée si intéressante - je ne dis pas belle - car il faut avoir vu les cadavres en tas pour savoir comment cela se passe. Mais quel coup d'œil ! des vrais tableaux de genre ... Un ciel classique sanglant, la nuée de corbeaux, les débris de casques, les armes broyées. On s'oublie à regarder avant que le râle bizarre et effrayant d'un homme qui va mourir ne vous fasse dresser les cheveux sur la tête. "

VACHE Jacques - Lettre à sa tante émanant de l'hôpital de "Nevers, le 30 Sept. 1915" où il vient d'être admis.

http://www.bibliorare.com/index.htm


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