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DEFENSE DE SALIVER DES YEUX !
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19 juillet 2005

440 : «Enfin nous sommes tous nés d'une semence venue du ciel "

972.
Enfin, si les êtres vivants, pour être capables de sentir, ont besoin d'éléments sensibles, comment se comporteront les atomes qui constituent en particulier l'espèce humaine ? Faudra-t-il donc qu'un rire aux éclats les secoue, ou que la rosée des larmes baigne leurs yeux et leurs joues ? Sans doute seront-ils habiles à discourir sur le mélange des corps comme à étudier les éléments qui les composent eux-mêmes ? Semblables en tout point à un homme intégral, ils devront comme lui résulter de principes divers, ceux-ci formés d'autres principes, puis ceux-ci encore, sans qu'on ose s'arrêter. Car tu ne m'échapperas pas et pour tout être que tu me citeras capable de parler, de rire et de penser, je te dirai qu'il doit se composer d'atomes ayant les mêmes facultés. Mon hypothèse est-elle le comble du délire et de la folie ? Peut-on rire sans être formé d'atomes rieurs, peut-on penser et rendre des comptes avec éloquence sans atomes philosophes et orateurs ? Alors pourquoi les êtres capables de sensibilité ne pourraient-ils se composer d'atomes qui en soient complètement dénués ?

990.
Enfin nous sommes tous nés d'une semence venue du ciel ; l'éther est notre père commun ; c'est de lui que la terre, notre mère nourricière, reçoit les gouttes de la pluie fécondante et enfante ainsi les brillantes moissons, les arbres vigoureux et la race des hommes, ainsi que toutes les espèces sauvages, puisqu'elle leur offre les biens avec lesquels ils se nourrissent, mènent douce vie et propagent leur espèce : ne mérite-t-elle pas bien le nom de mère qu'elle a reçu ? Et le cycle se renverse ; tout ce qui est sorti de la terre fait retour à la terre, et tout ce qui est descendu des régions de l'éther regagne le ciel et s'y fait recevoir. Ne va pas considérer comme une propriété essentielle aux atomes éternels l'apparence que nous voyons ondoyer à la surface des corps, naître de temps en temps et soudain disparaître. La mort en détruisant les corps n'anéantit pas leurs éléments ; elle se borne à dissoudre leurs unions, puis à en combiner d'autres ; elle fait en sorte que toutes choses changent de forme et de couleur, acquièrent le sentiment pour le perdre en un éclair d'où t'apparaît l'importance qu'il faut attacher aux combinaisons des atomes, à leurs positions, aux mouvements qu'entre eux ils s'impriment. C'est à l'aide des mêmes caractères que nous désignons le ciel, la mer, la terre, les fleuves, le soleil ; et de la même façon encore les moissons, les arbres, les animaux. Et dans nos vers eux-mêmes, l'ordre des lettres est essentiel, essentiels sont leurs arrangements ; les mots, non tous pareils, mais se ressemblant en grande partie, ne différent que par l'ordonnance des lettres. Ainsi en est-il des corps de la nature. Il suffit que changent leurs figures, - intervalles, direction, liens, poids, chocs, rencontres, mouvements, ordre, positions - pour qu'eux-mêmes se trouvent changés.

Lucrèce, De Natura Rerum, Livre II

http://remacle.org/bloodwolf/philosophes/Lucrece/livre1.htm


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