323 : "...du liebest den Göttlichen Grund in dir..."

1. LE DISCIPLE AU MAITRE : Comment puis-je parvenir à la vie supersensuelle, de telle façon que je voie Dieu et l’entende parler ?

LE MAITRE : Si tu peux t’élever, pour un moment, jusque-là où nulle créature n’habite, tu entendras Dieu.

2. LE DISCIPLE :  Cela est-il loin ou près ?

LE MAITRE : Il est en toi. Si tu peux garder le silence pour une heure dans ton vouloir et dans tes sens, tu entendras des paroles de Dieu inexprimables.

3. LE DISCIPLE : Comment pourrais-je entendre, si mon vouloir et mes sens sont en silence ?

LE MAITRE : Lorsque les sens et le vouloir de l’ ipséité (Selbheit) seront en silence, l’ouïe, le voir et le parler éternels seront manifestes en toi : Dieu lui-même entendra et verra par toi. Ton propre ouïr, ton propre vouloir et ton propre voir sont des obstacles qui font que tu ne peux ni voir ni entendre Dieu.

4. LE DISCIPLE : Par quel moyen puis-je voir et entendre Dieu, puisqu’il est au-dessus de la nature et de la créature ?

LE MAITRE : Lorsque tu te tiens en silence, tu es alors ce que Dieu était avant la nature et la créature, et d’où il a formé ta nature et ta créature. Et alors, tu vois et tu entends ce avec quoi il voyait et entendait en toi, avant que tes propres vouloir voir et entendre eussent commencé.

5. LE DISCIPLE : Qu’est-ce qui me retient, que je ne puisse parvenir à cet état ?

LE MAITRE : Ton propre vouloir, ton propre voir et ton entendre, et le fait que tu résistes à cela, d’où tu as tiré ton origine. Par ton propre vouloir, tu t’éloignes du vouloir de Dieu ; et par ton propre voir, tu n’envisages que ton vouloir. Ton vouloir bouche ton ouïe par ta propre sensualité vis-à-vis des choses terrestres et naturelles. Il t’introduit dans un fond et t’ombrage avec ce que tu veux, à tel point que tu ne saurais t’élever aux choses surnaturelles et supersensuelles.

6. LE DISCIPLE : Puisque je suis dans la nature, comment puis-je parvenir, par la nature, dans le fond supersensuel, sans la destruction de la nature ?

LE MAITRE : Trois choses sont nécessaires pour cela. La première, que tu donnes ta volonté à Dieu, et que tu t’abîmes dans sa miséricorde. La deuxième, que tu haïsses ta propre volonté et que tu ne fasses point ce qu’elle te dicte. La troisième, que tu te soumettes à la croix, afin que tu puisses soutenir les tentations de la nature et de la créature. Si tu fais cela, Dieu parlera au-dedans de toi. Il introduira ta volonté expropriée en soi, dans le fond surnaturel. Alors, tu entendras la parole de Dieu en toi.

[…]

( Jacob Boehme :  Confessions. Editions Fayard, 1981. Chapitre 15, Ecrit l’an 1622, p.181-182.)

http://jm.saliege.com/boehme.htm 

http://www.passtheword.org/Jacob-Boehme/index.html

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