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DEFENSE DE SALIVER DES YEUX !
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12 juin 2007

924 : Faim

Cependant, parmi ces objets d'élection, sa préférence allait indiscutablement aux livres que, très littéralement et dans tous les sens, il dévorait. Après avoir écorné les pages, il les déchirait en petits lambeaux filiformes, en mille miettes indistinctes, puis les mettait à l'épreuve de sa bouche – foyer ou nombril de son corps – et les réduisait alors en une sorte de pâte blanche, mélange informe de salive et de papier qu'il avalait avec délice ou, suivant les jours, rejetait avec une moue de dégoût.

C'est de cette époque, sans doute, qu'il date ses premières indigestions de texte, lorsque, emporté par sa frénésie, il dévorait tout un livre, et que sa bouche avalait plus que son corps ne pouvait absorber. C'est à cette époque aussi qu'il saisit toute la portée de cette expression exorbitante : " avoir les yeux plus gros que le ventre", alors que, désespérément, il tentait de venir à bout d'un gros et lourd volume (qu'il apprit plus tard être la Bible). Tout lui était prétexte à dévoration : il ne faisait alors, de même qu'aujourd'hui, aucune distinction de genre : il mangeait de tout : prose ou poésie, pièce de théâtre ou article de journal, tant ses goûts en matière de littérature le portaient naturellement vers l'éclectisme.

Jean-michel Olivier, Lautréamont, le texte du vampire, Lausanne (Vaud), Éd. L'Âge d'homme, coll. Cistre-essais n 12, 1981, 190 p.


 

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