294 : j'ai soulevé ma robe
[...] (J'ai toujours eu l'impression que toutes les soutanes avaient le même doigt, un doigt blanc à
la peau diaphane n'ayant jamais bêché un jardin ni remué le fumier des vaches pour nourrir
le champ, un doigt délicat fait pour se replier en mains jointes et en ridicule un doigt qui
pourtant savait la floraison des boutons interdits. Joseph nous avait raconté comment la
soutane de son village introduisait les sexes mouillés des femmes à vendre par la petite
porte dérobée du presbytère.)
J'ai doucement écarté les fichus
et les pochettes noires.
Je suis allée devant un peu sur le côté
et
j'ai soulevé ma robe
très très doucement.
Je sentais l'air vif lécher mes jambes et se faufiler dans ma culotte de coton blanc.
J'avais chaud,
mon sexe brûlait.
Les fichus sans yeux ne me regardaient pas,
et les soutanes se perdaient dans d'invraisemblables échafaudages superlatifs sur l'amour
de Dieu et le devoir des Hommes
alors je me suis assise
très très très doucement
un peu plus à gauche à l'arrière
derrière les visages chiffonnés
mais
face à vos soutanes et vos yeux
près des fleurs qui ne dorment jamais
sur un marbre de pluie froid.
L'eau était glacée comme votre homélie.
Mon sexe brûlait toujours.
Je retirais doucement ma culotte de coton blanc
et posait mon sexe chaud loin de ma robe
sur le marbre mouillé
alors,
les soutanes empourprées m'ont regardée
collée à la pierre.
« C'est pour elle et pour tuer vos doigts. »
Ma voix était bleue et aiguisée comme un meurtre.
Les doigts blancs n'ont rien dit.
Les doigts blancs étaient cloués.
J'ai joui tout de suite.
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(Alerte Rouge - 4 rue du Blason - 59650 Villeneuve D'Ascq. http://membres.lycos.fr/alerterouge/Elements/Autres_pages/Projets_Creations.html )