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DEFENSE DE SALIVER DES YEUX !
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4 juin 2008

1110 : O Mère d'Énée

Ne remarques-tu pas que nos yeux, lorsqu'ils se portent sur des objets minuscules, se fixent avec effort et attention, sans quoi ils ne pourraient assez les saisir ? Et même les corps les plus manifestes, si l'esprit ne s'y applique, restent pour lui comme dans un recul fort lointain. Faut-il donc s'étonner que l'esprit laisse échapper tous les simulacres auxquels son attention ne s'est pas donnée tout entière ?

(...)

En se gardant de l'amour, on ne se prive pas des plaisirs de Vénus ; au contraire, on les prend sans risquer d'en payer la rançon. La volupté véritable et pure est le privilège des âmes raisonnables plutôt que des malheureux égarés. Car dans l'ivresse même de la possession l'ardeur amoureuse flotte incertaine et se trompe ; les amants ne savent de quoi jouir d'abord, par les yeux, par les mains. Ils étreignent à lui faire mal l'objet de leur désir, ils le blessent, ils impriment leurs dents sur des lèvres qu'ils meurtrissent de baisers. C'est que leur plaisir n'est pas pur ; des aiguillons secrets les animent contre l'être, quel qu'il soit, qui a mis en eux cette frénésie. Mais Vénus tempère la souffrance au sein de la passion et la douce volupté apaise la fureur de mordre.

Lucrèce. De la nature. Ed. Garnier Flammarion, 1964, p.138-145.


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