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DEFENSE DE SALIVER DES YEUX !
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20 avril 2007

900 : "Remettez-moi mes yeux"

Mardi 20 mars, au terme de deux jours d'audience, la cour d'assises du Gard a condamné Mohamed Hadfi à trente ans de réclusion criminelle pour des actes de torture et de barbarie à l'encontre de sa femme, Samira Bari. Il lui était reproché de lui avoir arraché les yeux.

Les faits, commis à Nîmes, remontent au 2 juillet 2003. Ce jour-là, le jeune homme, âgé de 31 ans, originaire de la région de Meknès (Maroc), décrit comme violent, s'en est pris physiquement à son épouse quand celle-ci s'est refusée à une relation sexuelle, alors que le couple était en instance de divorce. Il lui a retiré les yeux des orbites avant de l'abandonner, le visage ensanglanté.

Désormais aveugle, Samira Bari a témoigné de son calvaire à l'audience. "J'étais à quatre pattes, je criais : "Remettez-moi mes yeux"", a-t-elle lancé à un prétoire médusé.

Les débats ont permis de revenir sur les conditions dans lesquelles ce couple s'est connu après un mariage arrangé au Maroc. Le poids des traditions, de la religion, des superstitions, de la sorcellerie décrit le contexte dans lequel leurs relations se sont nouées. L'arrivée en France du mari, débarqué du bled à la faveur de la Coupe du monde de football en 1998 pour rejoindre sa femme, fait aussi écho à sa galère d'immigré marocain, en quête de régularisation.

Choc des cultures, des époques aussi, qui vient éclairer un passage à l'acte pour lequel l'accusé a été déclaré responsable après examen par une série d'experts psychiatres depuis son incarcération en août 2003.

Face à lui, l'avocate de la victime, Me Isabelle Mimran, a demandé à la cour de "la protéger au maximum". L'avocat général, Dominique Tourette, estimant que l'accusé s'était "littéralement déchaîné comme une bête fauve", a requis une peine de trente ans assortie d'une période de sûreté de vingt ans.

Pour la défense, Mes Ferri et Cabanes sont revenus sur l'histoire de cet immigré, confronté "à un monde qui n'était pas le sien (...). La cécité de sa victime est éternelle, faites que sa prison, à lui, ne le soit pas. Ne cédez pas à ce que l'émotion vous inspire."
Les jurés des assises du Gard l'ont finalement condamné à trente ans de réclusion criminelle, mais sans peine de sûreté, et à une interdiction définitive du territoire français.


Hocine Rouagdia
Le Monde, 21 mars 2007.


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